Ce travail est un travail collectif réalisé par la classe de 2ème année en CAP Bijouterie/Joaillerie de la HEJ Paris et de l’Institut des Métiers d’Excellence de LVMH. L’année 2025 était consacrée à la maison Kenzo, il nous était proposé de réaliser des pièces à partir du thème des inspirations multiculturelles de Kenzo. Nous avons voulu proposer un bouquet, des objets donc, à la frontière entre l’orfèvrerie et la joaillerie. Ces objets pourraient être utilisés en décoration, en fleurs éternelles, symbolisant la durabilité des pièces de joaillerie. Mais nous voulions garder le cœur de notre métier, les bijoux, dans ces fleurs. Nous y avons donc caché des bijoux, fondus dans les fleurs.
Sur cette pièce, je me suis occupé de toute la joaillerie, y compris le système d’assemblage à vis et la trembleuse.
Pour représenter les inspirations de Kenzo, nous avons choisi de réaliser un coquelicot en échelle réduite, le tout en utilisant nos techniques de joaillerie.

Le coquelicot étant une fleur iconique pour Kenzo, nous avons choisi de réaliser un pavage de pierres sur les pétales. Cela nous permet d’avoir des pétales rouges sans laques ou colorations du métal, et de mettre en avant une technique de haute joaillerie : le pavage aléatoire ou en neige.
Avant cela, il fallait réussir à donner un aspect végétal au métal. Nous sommes partis de plaques de métal (appelés planés) que nous avons mis en forme à l’aide de bouterolles et de dés à emboutir. La bouterolle a une boule à son extrémité qui permet d’enfoncer le métal lorsque l’on tape dessus. Divers dés à emboutir permettent d’avoir des contreformes que l’on va venir épouser progressivement en déformant le métal. Il a fallu plusieurs essais pour avoir des résultats satisfaisants. L’objectif étant d’être le plus ressemblant possible à la réalité, mais aussi que ça puisse être sertissable, les pétales ne sont donc pas trop refermées sur elles même.
Pour pouvoir sertir des pierres, nous avons besoin d’une certaine épaisseur de métal (12/10e de mm), le problème est donc que c’est beaucoup plus épais que dans la réalité. En particulier au niveau du centre on voit vite l’empilement des épaisseurs, les bords droits des pétales, ainsi que la tige centrale. Pour casser ce manque de réalisme, plusieurs améliorations ont été faites. Les deux pétales du dessous s’ajustent l’une dans l’autre et sont ajustées pour arriver au même niveau à leur base. Les bords extérieurs sont limés en arrondis pour casser l’angle et cacher l’épaisseur. Sur la pétale du haut, un ajout de métal vient épouser celle ci et rajoute de l’épaisseur pour cacher le système d’assemblage et avoir un rendu réaliste entre les pétales.

Une fois les pétales réalisées, il fallait penser et réaliser un système d’assemblage qui respectait 2 critères : la démontabilité (pour séparer les pièces et pouvoir sertir les pierres) et avoir un système de trembleuse. La trembleuse est un système qui grâce à un ressort amplifie un tremblement initié par le toucher ou par le mouvement de la pièce. Ainsi les pétales tremblent comme si c’était une vraie fleur animée par le vent.
Pour réussir à réaliser ces critères, un système d’emboîtement et de vis a été pensé, les pétales s’emboîtent entre elles et sont serrées entre elles par le cœur de la fleur qui agit comme un écrou.
Pour la trembleuse, l’ensemble des pétales assemblées est lié à la tige par un ressort qui supporte son poids. Il ne repose donc que sur le ressort qui a un petit jeu dans la tige qui permet le mouvement sans que ça puisse aller trop loin.




Le centre de la fleur est composé d’une boule en laiton et les pistilles sont en argent (qui sera noirci ultérieurement), ce sont des fils fins soudés tout autour du centre puis en faisant fondre l’extrémité on obtient des boules de formes aléatoires.

Une fois les pièces réalisées, on a pu commencer à faire la mise en pierre, c’est à dire tracer et répartir des pierres sur toute la surface de la pétale.

Réaliser cette mise en pierre demande beaucoup de temps car il faut réussir à tracer bien rond, mais aussi réussir à coller toutes les pierres entre elles. Le but étant d’avoir le moins de métal restant. Il faut donc souvent effacer des parties pour refaire les répartitions et progressivement avoir un résultat parfait. Il faut aussi maîtriser les diamètres car il ne faut pas avoir des cercles trop petits, les pierres utilisées n’existant pas en dessous de 1mm. On essaye aussi d’avoir d’assez grandes pierres pour limiter le nombre de pierres totales et donc le travail.
Une fois les ronds tracés, on peut progressivement ouvrir les trous à la fraise boule, en respectant le dessin. Il faut à cette étape ne pas trop ouvrir pour laisser les derniers ajustements pour le serti.

La prochaine étape est de percer à travers tous les trous avant de commencer les mises à jour.
Les mises à jour permettent de réduire la quantité de métal, faire rentrer la lumière par le dessous et avoir un beau rendu.
On utilise souvent une répartition en nid d’abeille c’est à dire un pan plat entre chaque contact entre les pierres. Il faut réussir à avoir un espacement constant et des lignes bien droites. Le tout est fait à la scie, qui est le seul outil assez fin pour passer dans les perçages.



Une fois ces étapes finies, les pièces sont confiées au polisseur ou polisseuse qui vont enfiler (polir) les mises à jour. Il faut le faire maintenant car une fois les pierres serties ce ne sera plus possible. Pour cela il faut utiliser une fine bande de coton imprégnée de pâte à polir et enfiler chaque pan de chaque mise à jour pour les faire briller.

Une fois polies, les pétales sont réparties pour le sertissage, on a choisi d’utiliser des oxydes de zirconium rouges mais avec quelques oranges pour ajouter des reflets.






Pour le centre, nous avons réalisé une petite étoile à rajouter par dessus la boule en laiton pour avoir plus de réalisme par rapport au coquelicot naturel. Toutes les parties en argent (pistilles et étoile) sont texturées à la fraise puis noircies avec une patine.


Le haut des pétales (bord et serti) est poli avant de réaliser l’assemblage.









Crédits
Joaillerie : Thomas Tranlé
Sertissage : Enora Fernandez, Eugénie Madec, Benjamin Verleyen
Polissage : Augustin Lemaitre, Colin Maffre, Marie Girault